Décivilisation ou mauvaise éducation
Les violences en tous genres sont l' objet de nombreuses polémiques sans distinguer le caractère hétérogène des celles-ci selon qu'elles soient d'ordre privées, publiques, politiques ou internationales.
Les violences d' ordre privées sont d'abord les violences dont sont victimes les plus faibles : les enfants et les femmes. L'auteur des violences est celui qui est le plus fort et qui se sert de sa brutalité pour asseoir son autorité. Plus celle-ci est contestée, plus il sera violent. Cette sauvagerie doit naturellement être réprimée très sévèrement par la justice.
La violence ne s'exprime pas que dans le champ privé. Les enseignants, les pompiers, les soignants, les caissières de supermarchés et plus généralement toutes les personnes en contact avec le public sont confrontées à des réactions violentes, physiquement ou moralement. Toutes contraintes, toutes disciplines, toutes contrariétés sont perçues comme des coercitions insupportables justifiant une réponse violente. Ce qui, chez un jeune enfant , apparaît comme un caprice, devient chez l'adulte sujet de colère brutale .
Le lien entre violence et éducation est évident. Depuis la seconde moitié du 20eme siècle, les pédopsychologues ont insisté sur les risques de traumatismes psychiques chez l'enfant confronté à une éducation trop rigide. Des interprétations excessives des théories de Françoise Dolto ont eu pour conséquence que les parents sont tétanisés dés qu'ils doivent faire preuve d'autorité. Toute frustration imposée à l'enfant est perçue comme perversion de la part de parents indignes. Pourtant, comme l'a souligné le docteur Joseph Naouri, il est indispensable que les parents cessent de culpabiliser puisque l'enfant se construit sur ses frustrations. Non seulement les parents ont peur de traumatiser leurs enfants, mais ils font pression sur les professeurs en contestant les punitions infligées à leur chères têtes blondes. Un châtiment corporel même minime peut même conduire des parents devant le tribunal correctionnel. Il n'est pas question ici d'excuser la sauvagerie de certains parents envers leurs enfants martyrs. Ces comportements existent malheureusement et doivent être sévèrement réprimés. Pour clarifier les choses, il serait peut-être bon que les juges , les pédopsychiatres et les éducateurs définissent un code des punitions permises et celles qui ne le sont pas. Quand certains psys affirment qu'il est dangereux pour l'équilibre de l' enfant de le punir en l'enfermant dans sa chambre, on est en droit de se demander comment les parents peuvent réprimer un enfant récalcitrant.
La lutte contre la violence est avant tout une affaire d'éducation. Souvent, si l' enfant est violent , c'est parce que l'on pas su lui apprendre à gérer ses émotions. Ni les colères, ni les caprices de l' enfant ne doivent être acceptés. Si les parents et les éducateurs sont démunis devant le caprice, l'enfant comprend très vite que c'est un moyen efficace pour obtenir tout ce qu'il veut. Devenu adulte, il ne comprendra pas les interdits que lui opposera la société et il les transgressera par la violence. Si cette violence est réprimée, n'ayant jamais su gérer ses frustrations, le rebelle s'enfermera dans une ultra-violence justifiée par un sentiment d'injustice et de percussion et ce d'autant plus qu'il est souvent dans l'incapacité d'exprimer par un discours cohérent les raisons de son mécontentement.
La violence trouve également sa source dans la proliférations de jeux et spectacles violents. Les jeux du cirque de l'antiquité ont été heureusement abandonnés, mais ils sont remplacés par des jeux virtuels tout aussi agressifs. Il s'agit d'éliminer virtuellement des adversaires. Leurs morts sont récompensées par une belle explosion et l' attribution de points. L'adversaire est par définition le méchant qu'il faut tuer. Pas besoin de justification à la mort de l' adversaire ; pas de pitié, pas de compassion, pas de pardon. Lorsque des enfants ou des adultes passent des heures par jour à s'entre-tuer virtuellement, il ne faut s'étonner qu'un regard de travers puisse entraîner la mort.
Les violences politiques sont d'un autre ordre. Il s'agit ici de déstabiliser le pouvoir en place pour décrédibiliser le personnel politique et favoriser ainsi la perse de pouvoir par les extrêmes. Après les violences pendant les manifestations contre la réforme des retraites, les politiques se sont affrontés pour innocenter ou condamner les brutalités de part et d'autres. La gauche mettant en avant la férocité de la répression policière et la légitimité d'une action spontanée contre une réforme inique. Le gouvernement quant à lui se retranchant sur le nécessité d'une réponse ferme face aux débordements et pillages. Selon Max Weber, l' État a le monopole de la violence légitime. Pour les révolutionnaires et les Marxistes, la violence est légitime pour renverser un gouvernement exploiteur qui est légal mais non légitime. Cette distinction entre le gouvernement légal et le gouvernement légitime permet de justifier toutes les révoltes, car la légitimité d'un gouvernement est une notion essentiellement subjective. La notion de légitimité, issue de l'ancien régime, reposait sur l'idée d'un Roi légitime parce que de droit divin et donc incontestable. Au contraire, la légitimité du pouvoir républicain émane de la volonté du peuple qui s'exprime a travers des représentant élus. Dés lors, toute violence ou incivilité contre un élu est par essence antidémocratique. Pour beaucoup, tout ce qui va dans le sens de leurs opinions est légitime, tout ce qui s'y oppose est illégitime à leurs yeux et permet donc la violence. Cette théorie est la négation même de la démocratie puisque celle-ci ne peut exister s'il n'existe un respect mutuel entre la majorité et la minorité.
Faut-il rappeler que la tempérance est une des quatre vertus cardinales et que la politesse ne consiste pas en une série d'usages surannés et hypocrites mais qu'elle consiste dans le respect de l'autre et qu'elle est donc le fondement de toute vie sociale. Il n'est pas utile de parler de décivilisation. Parlons plutôt d'impolitesse ou de mauvaise éducation. Apprendre le respect de l'autre, c'est la base de la démocratie. L'impolitesse est le fondement de la dictature.
Il n'est donc pas étonnant que les violences internationales soient presque exclusivement le fait de régimes dictatoriaux qui se moquent du droit international. Ces dictateurs sont comparables aux enfants gâtes qui refusent les règles que le droit international essaye d'imposer . De même que dans une cour de récréation, les garçons et les filles les plus mal élevées s'associent pour harceler les plus faibles, les voyous internationaux ne s'attaquent qu'à ceux qu'ils pensent incapables de se défendre. Ils bafouent les traités et les frontières le plus souvent dans le seul but de se maintenir au pouvoir. Sans aucun respect pour l' autre, ils sont capables de lancer des armées dans des batailles comme un enfant mal élevé lance son jouet à la figure du parent qui veut lui confisquer. Mais le plus souvent, nos démocraties tardent à confisquer aux voyous internationaux les yachts et les châteaux achetés avec l' argent qu'on leur donne pour leur pétrole ou leur gaz.