LA REPRÉSENTATION NATIONALE EST ELLE EN DANGER?

MENACES SUR DÉMOCRATIE REPRÉSENTATIVE.

      La démocratie française repose depuis la Révolution sur l'idée de souveraineté nationale telle que théorisée par l' abbé Seyes. Le peuple est seul souverain qui délègue à des représentants élus réunis en assemblée ; cette représentation nationale détient le pouvoir législatif et le gouvernement est responsable devant elle.

      La souveraineté nationale s' oppose au principe de la souveraineté populaire inspirée de Rousseau qui repose sur l'expression directe de la volonté du peuple par des assemblées de citoyens  et des référendums. Si le peuple est trop nombreux pour se réunir, il lit des représentant s révocables à tout moment et dotés de mandats impératifs

      Les III° et IV° Républiques en France, comme le système anglais, sont des variations sur le thème de la souveraineté nationale. En instituant l'élection du Président au suffrage universel, et en introduisant le référendum, la V° République empreinte à la démocratie directe et pervertit le modèle de la souveraineté nationale selon la volonté du Général de Gaulle qui avait en aversion le système des partis politiques, responsables à ses yeux de la paralysie de la IV° République. Après l' échec du référendum sur l' Europe, les présidents se sont méfiés de cette procédure aux résultats toujours incertains parce que les électeurs ne répondent toujours pas à la question posée et transforment le référendum en plébiscite.

      Le Président Macron, parvenu au pouvoir en dehors des partis, est le digne héritier du Général. C'est sans doute pour la même raison que s'installe peu a peu une nouvelle forme de démocratie : la démocratie participative dont la convention citoyenne pour le climat est le dernier avatar .

      La V° République est née de l'instabilité ministérielle décrédibilisant l'action gouvernementale; elle traverse a son tour une crise du même ordre. L'idée d'une démocratie participative trouve en effet ses origines d'une part dans les scandales ruinant la réputation des hommes politiques ( Cahuzac, Balkany, Thevenoud, Fillon) et d'autre part dans la révolution Internet.

      La volonté de réunir une convention citoyenne avait pour but, en réponse à la crise des gilets jaunes, de montrer que le pouvoir était à l'écoute des citoyens en passant par dessus les partis et les syndicats. Les revendications de gilets jaunes, souvent brouillonnes et confuses, n'avaient pourtant rien à voire avec le réchauffement climatique. En réalité, il s'agit pour le Président de retrouver une partie du soutien populaire qui était en train de s'effilocher. La date choisie pour dévoiler les souhaits de la convention n'est pas innocente : il s'agit d'une tentative de reconquête de l' électorat vert pour les municipales.Le moins que l'on puisse dire c'est que c'est raté ! Il est à cet égard surprenant que la convention propose une nouvelle limitation de vitesse alors que ce fut précisément une des étincelles qui provoqua l'explosion des gilets jaunes. Le Président a eu la prudence de la rejeter.

     La démocratie participative ainsi que le démontre très clairement Gerald Bronner dans « la démocratie des crédules »répond à l'exigence de l'opinion publique de tout savoir, tout dire et tout décider en usant et abusant des sites Internet pour s'opposer à la confiscation du débat politique par les experts et les élites politiques. Cette participation aux décisions par le biais de forums , pétitions ou discussions sur les réseaux sociaux n'est pas sans danger. On sait en effet que les idéologues de tous poils sont particulièrement actifs sur Internet alors qu'au contraire le vrais sachants n'éprouvent souvent pas le besoin ou n'ont pas le temps de démentir les thèses les plus farfelues. Le complotisme y règne également en maître. Les rumeurs et fake-news y prolifèrent. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, Internet n'est pas un outil neutre pour nourrir une délibération collective.  

      La convention citoyenne pour le climat n'est pas non plus exempte de reproches sur le plan démocratique. Sa composition, qui se veut une image fidèle de la population selon les critères de l' INSEE, ignore toutes les personnes n'ayant pas le téléphone ! Les présidents et vice présidents n'ont aucune légitimité puisqu'ils ont été désignés et non élus par les membres de la convention. Les experts sont également choisis par les présidents et non par les membres. Il est plus que probable qu'ils penchent tous dans la même direction. L' anonymat des membres de la convention est également anormal. Enfin, comme dans toute assemblée, le risque de voir les délibérations faussées par des militants idéologues plus entraînés aux joutes oratoires est renforcé par le fait qu'une majorité des membres ne doit pas particulièrement s'intéresser aux questions de politique climatique (Si l' INSEE a bien travaillé, 35% des membres de la convention sont des abstentionnistes!) A contrario,lorsqu'un individu brigue les suffrages de ses concitoyens, pour avoir des chances d'être élu, il faut qu'il démontre une certaine maîtrise des questions politiques. Les représentants élus sont donc moins sujets à des manipulations que des personnes simplement tirées au sort .Contrairement à ce qui peut arriver avec le tirage au sort, il est rare que les citoyens choisissent des représentants analphabètes, débiles ou fous.

      La démocratie délibérative adopte le principe de division du législatif, ce qui n'est pas sans rappeler le Consulat qui avait institué un système dans lequel une assemblée proposait les projets de loi, une deuxième les discutait , une troisième les votait sans avoir le droit ni de les discuter ni de les amender et une quatrième vérifiait la constitutionnalité. Dans la vision macronienne, une assemblée non élue suggère des projets, le président fait son choix parmi ceux-ci et les soumets au peuple qui ratifie ou non. On voit bien que le parlement est contourné et n'a plus son mot à dire. Dés lors on peut se demander à quoi il sert ! Si le président voulait discréditer la Représentation Nationale, il ne s'y prendrait pas autrement. Serait-il tenté d'instaurer un régime de nature bonapartiste pour résoudre les crises qui se profilent à l' horizon et la perte d'une majorité au parlement lors des prochaines élections?

     Les partis politiques et les syndicats concourent à la vie politique. C'est un principe constitutionnel. Le président est le garant de la constitution. Toute atteinte de sa part à l'esprit de la Constitution est donc une véritable forfaiture. NON à la tentation du Macronapartisme !